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Appel à contribution : Sociabilités savantes et transmission des savoirs. Regards croisés entre Orient et Occident

  • Dernière modification de la publication :10 février 2025
  • Post category: Appel à communication


Colloque : jeudi 15 et vendredi 16 janvier 2026

Calendrier

  • Février 2025 : Appel à communications
  • 15 mai 2025 : Retour des propositions
  • 30 juin 2025 : Sélection des propositions retenues
  • 15-16 janvier 2026 : Colloque

Argumentaire

L’activité intellectuelle et plus largement culturelle, bien que souvent dépeinte comme une entreprise solitaire, est aussi une affaire collective, faite d’échanges, de transmissions et de transferts. Dans bien des sociétés, elle se fonde notamment sur l’existence de lieux où les individus discutent et débattent de sujets divers et variés : cercles, académies, salons, etc. Les sociétés médiévales ne font pas exception, et la transmission des savoirs s’inscrit souvent dans le cadre de sociabilités savantes, que celles-ci soient formelles, et même institutionnalisées, ou plus informelles. Dans l’Islam médiéval de Bagdad à al-Andalus, ces lieux sont ordinairement appelés maǧālis (sing. maǧlis) : ceux-ci peuvent se réunir à l’initiative des califes, des vizirs ou d’autres autorités. Le Moyen Âge chrétien, qu’il s’agisse de l’Occident latin ou de l’Orient byzantin, ne connaît pas de terme unique pour désigner ces cercles savants, mais de l’Académie palatine réunie autour de Charlemagne à la Librairie de Charles V, en passant par la Magnaure des premiers empereurs macédoniens, plusieurs de ces milieux sont déjà connus et étudiés.

Notre colloque se propose d’engager la comparaison entre ces différents types de sociabilités savantes en étudiant la composition de ces groupes, leur structuration et leur fonctionnement, la manière dont ils interagissent avec les pouvoirs qui les favorisent ou les protègent, et les pratiques de production et de transmission des savoirs dans lesquelles leurs membres sont impliqués.

Un premier axe de réflexion porte sur les réseaux, les institutions et les lieux où se développent ces sociabilités, et plus particulièrement :

  • Les divers noms qui, dans les langues des espaces étudiés, sont donnés à ces cercles ou à ces rencontres, mais aussi aux échanges et débats qui s’y déroulent (disputatio, dialogos, munāẓara…).
  • Les espaces où se réunissent les savants. Qu’elles soient publiques ou privées, ces assemblées se déroulent dans des lieux divers : demeures des savants eux-mêmes, cours des souverains, lieux de culte et bâtiments attenants, librairies, bibliothèques, bains, marchés, hôpitaux, et bien sûr institutions éducatives… Notons, à propos de ces dernières, que l’on ne considère ici que les formes d’échange qui supposent une certaine égalité entre les participants, et non celles qui engagent une relation conçue comme foncièrement verticale : les relations maîtres-élèves (ou maîtres-disciples) ne seront donc pas traitées dans le cadre de ce colloque. Par conséquent, les écoles, madrasas, universités, etc., ne sont ici considérées que comme espaces abritant des discussions savantes.

Un deuxième axe considère les participants à ces rencontres et les interactions entre les divers acteurs impliqués :

  • Les savants eux-mêmes, à travers leur parcours, leur formation, leurs domaines de connaissance, leurs productions… Toutefois, il ne s’agit pas de proposer des travaux monographiques sur telle ou telle figure, mais de montrer comment se réalise leur insertion dans les réseaux auxquels ils se rattachent et quels sont les enjeux de leur participation.
  • Les interactions entre savants au sein des cercles auxquels ils appartiennent. Celles-ci peuvent reposer sur la coopération ou, au contraire, sur diverses formes de rivalité. De fait, la rencontre entre savants issus de différentes traditions intellectuelles (mais aussi religieuses, idéologiques, politiques, etc.) peut conduire à des collaborations fructueuses, mais aussi à des tensions, voire des impasses.
  • Les questions de protection et de patronage accordés ou non par les pouvoirs en place. Ces relations peuvent prendre la forme d’un mécénat plus ou moins distant, mais aussi d’une participation active des souverains ou de leurs agents aux travaux de ces cercles. Les autorités peuvent également entrer en concurrence pour attirer les compétences et les talents de savants dont la renommée accroît le prestige de leur cour. Cela pose aussi la question de l’indépendance des intellectuels, tant par rapport aux cercles dont ils sont membres que par rapport aux pouvoirs qui les protègent, mais aussi de l’éventuelle instrumentalisation du savoir et des savants.

Le troisième axe porte sur les pratiques mises en œuvre dans ces cercles afin de produire ou transmettre des connaissances :

  • La fabrique du savoir au cours des rencontres. On s’interrogera d’abord sur leur déroulement : y a-t-il un programme prédéfini, un protocole habituellement suivi ? La part du formel et de l’informel dans les échanges est une dimension importante de leur étude.
  • Les pratiques en marge de la rencontre savante proprement dite. L’échange suppose des formes de convivialité qui dépassent parfois les enjeux purement intellectuels. On pense à toutes les formes de divertissement (chant, musique, danse…), aux discussions autour de la nourriture ou de la boisson, mais aussi à d’autres pratiques de sociabilité typiques des élites.
  • Les dynamiques entre oralité et écriture. L’échange, au cours de la réunion, se fait avant tout de manière orale, mais l’écrit n’est jamais complètement absent. Par exemple, la composition ou la compilation d’ouvrages a connu un développement spectaculaire à l’époque abbasside : dans ce cadre, la production intellectuelle se faisait soit par écoute (samāʿ) directe, soit sous la dictée (istimlāʾ), soit à travers des débats et échanges ; ces pratiques orales pouvaient, selon des modalités variées, déboucher sur la production d’ouvrages écrits, impliquant alors des copistes ou des secrétaires, mais aussi les participants eux-mêmes. D’autres aires culturelles ont pu connaître des dynamiques comparables ou profondément différentes.
  • Les questions de contact entre les langues. Certains cercles ne mettent en œuvre qu’une seule langue (c’est habituellement le cas à Byzance ou dans les universités de l’Occident latin à la fin du Moyen Âge), mais plusieurs impliquent des pratiques polyglottes. On étudiera donc les modalités orales ou écrites du passage d’une langue à l’autre, la traduction étant souvent un vecteur ou un objectif de l’échange. De fait, l’Orient et l’Occident musulmans et chrétiens connaissent d’importants mouvements de traduction. Ainsi, la cour d’Alfred le Grand, roi des Ouest-Saxons à la fin du IXe siècle, rassemble des savants venus de plusieurs régions de l’Europe du Nord-Ouest en voit la mise en œuvre d’un programme de traductions du latin vers le vieil anglais.
  • Les contacts entre différents réseaux de sociabilité ou le maintien de liens entre les membres éloignés d’un même réseau. C’est le cas, par exemple, des voyages savants (riḥla), des ambassades, des missions d’information ou de collecte d’ouvrages, des correspondances, de l’échange de dons…

Le colloque s’inscrit dans une réflexion sur les dynamiques intellectuelles et sociales qui ont façonné les pratiques de transmission du savoir dans différentes aires culturelles ; elle vise à explorer les mécanismes concrets de la transmission, ses acteurs, et les lieux où elle s’est développée, tout en s’interrogeant sur les transformations liées à ces pratiques, tant en Orient qu’en Occident, tant en milieu chrétien qu’en milieu musulman. Elle invite les chercheurs à explorer comment les savoirs se sont diffusés, transformés et enrichis grâce aux interactions entre savants dans des contextes précis. Nous proposons d’examiner ces problématiques à travers des études interdisciplinaires, couvrant la littérature, l’histoire, la philologie, l’histoire des sciences, et bien d’autres domaines. Les contributions de chercheurs confirmés, mais aussi de doctorants et de jeunes chercheurs, sont les bienvenues.

Nous prendrons en charge l’hébergement et les repas ; les trajets seront en revanche à la charge des intervenants. Enfin, nous envisageons de soumettre à une revue une partie des communications présentées, afin de constituer un dossier thématique ou un numéro spécial.

Les propositions de communications doivent être envoyées par courrier électronique aux deux organisateurs, avant le 15 mai 2025. Merci de bien vouloir fournir dans un même document un bref CV (une page maximum), un résumé (500 mots maximum) et quelques indications bibliographiques.

Organisateurs :

Calendrier :

  • Février 2025 : Appel à communications
  • 15 mai 2025 : Retour des propositions
  • 30 juin 2025 : Sélection des propositions retenues
  • 15-16 janvier 2026 : Colloque